Depuis deux ans, Antoine Cavelius fait partie du bureau des sports de l’École Centrale Supélec, qui organise le TOSS, un des plus grands tournois sportifs d’étudiants en France. Pour cette 30e édition, il est Président de l’association et manage l’organisation de l’événement qui aura lieu les 12 et 13 prochains sur le campus de Gif-sur-Yvette.

 

Depuis quand le TOSS existe-t-il ?

La première édition a eu lieu en 1989 ! Il y avait 400 participants venant des écoles avoisinantes. À l’initiative des membres du bureau des sports de Supélec, le tournoi omnisports a au départ été crée sans prétention, afin de rassembler une cinquantaine d’équipes sur quelques sports. D’année en année, l’effectif a fortement augmenté jusqu’à atteindre près de 4 000 participants en 2018.

 

Quelle est la mission de votre association ?

Notre association se compose de deux facettes :

– D’un côté, nous sommes le bureau des sports donc cela suppose la gestion de l’association sportive du campus tout au long de l’année.

– En plus de cette première activité, nous organisons le TOSS, un grand tournoi omnisports qui a lieu tous les ans au mois de mai.

 

Nous comptons 1500 adhérents inscrits à l’année et incluant des étudiants et des membres du personnel de l’école, pour seulement 36 membres organisateurs des sports sur le campus qui gèrent en parallèle toute la partie événementielle. En février, nous proposons aussi un tournoi de foot dans le Centre National du Foot situé à Clairfontaine. En début d’année, a également lieu une rencontre avec les anciens de l’école et les étudiants pour faire une journée sport et réseau. Pour le TOSS, les 18 premières années se voient chacun attribuer un tournoi qu’ils doivent gérer en intégralité, de la formation des équipes à la logistique du tournoi le jour J avec les règlements et les poules, etc. Les deuxièmes années gèrent quant à eux toute la logistique qui est derrière, segmentée en pôles :

– Accompagnement des participants,

– Services – tentes, hébergement et sanitaires,

– Relations entreprises et partenaires.

le TOSS un tournoi organise par de nombreux etudiants

Quelle préparation suppose un tel évènement ?

À partir du mois de février, toute l’équipe est remodelée et un nouvel organigramme est constitué en parallèle du BDS. Chacun se voit attribuer un nouveau poste pour le TOSS en plus du poste qu’il occupe dans le bureau des sports. Par exemple, la Secrétaire générale du BDS et aussi Responsable de l’accompagnement des participants du TOSS. Elle gère tout le système des navettes et du fléchage sur le campus. Seulement deux responsables du TOSS sont nommés un an avant l’événement pour lancer la préparation en amont avec l’aide du Président. Ensuite, une fois ce background préparé, dès février, le reste de l’équipe sait exactement ce qu’il a à faire. Chacun doit suivre un rétro-planning ultra précis pour finaliser la préparation durant les 4 mois intenses restants.

 

Nous faisons également appel à 200 bénévoles supplémentaires sur le campus pour le week-end du TOSS. Ce sont des étudiants de Centrale Supélec qui se proposent de nous aider, et en échange nous leur offrons la participation au tournoi et le repas. On fait en sorte qu’ils soient libérés sur des créneaux pour faire leur tournoi. À la fin du tournoi, pour les remercier de leurs 19h de staff en moyenne sur l’événement, on leur prépare un grand barbecue.

 

Cela doit représenter une organisation de dingue ?

L’année dernière, les deuxièmes années ont décidé de suivre la norme Iso 9001 pour organiser l’événement. C’est une norme de management de la qualité, avec des audits réguliers, qui nous force à tenir la gestion de l’association avec précision et rigueur. Dans une association comme la nôtre qui évolue chaque année avec des passations et de nouvelles équipes, il est important d’éviter au maximum la perte de savoir et de qualité. La norme nous oblige à tenir les documents à jour, à avoir des traces écrites notamment les rétro-plannings qu’on appelle diagrammes de Gantt. Cela nous permet d’avoir des deadlines précises et d’éviter que les informations ne se perdent à l’oral. Des entreprises de certification comme le Bureau Veritas ou Afnor certifient ces normes si l’on s’engage à respecter un certain nombre d’articles. La certification dure sur 3 ans avec 2 audits de suivi, et au terme de cette période, il faudra renouveler la certification.

organisation du tournoi du TOSS avec le village

Quelle est la particularité du TOSS par rapport aux autres tournois sportifs destinés aux étudiants ?

Ce qui fait la particularité de l’événement, c’est qu’il est réellement ouvert à tous, on ne cible pas des étudiants en particulier. Un de nos concurrents, le Challenge Centrale Lyon, qui est aussi un tournoi omnisports, rassemble beaucoup d’étudiants, mais ouvre son tournoi uniquement aux grandes écoles d’ingénieurs, donc ça limite pas mal. Nous, on a décidé d’accueillir aussi bien les universités, les DUT, les Écoles de Commerce, les Écoles d’ingénieur… pour réunir des gens de tous les horizons et les rassembler autour du sport.

Y a t-il d’autres activités proposées en parallèle des tournois sportifs ?

C’est un événement avant tout sportif mais aussi festif : on propose de nombreuses activités tout au long de la journée auxquelles tous les participants peuvent accéder parce qu’on fait en sorte de cantonner les phases de poules sur une demi-journée le samedi pour leur laisser le temps de profiter des activités de saut à l’élastique, de paintball, de biathlon, etc. On met en place un épicentre de l’événement qu’on appelle le village TOSS, qui est le point de rassemblement des participants durant leur temps libre. C’est là-bas que sont installés les stands partenaires qui proposent des activités ou distribuent des plaquettes, discutent avec les étudiants. Il y a aussi une grande buvette non alcoolisée sponsorisée par Red Bull avec des sodas, des jus de fruits, des barres chocolatées, etc.

 

Le samedi soir, une fois que les tournois sont finis, on prévoit un show surprise. L’idée c’est de rassembler les participants un peu avant le dîner durant la période de flottement où d’expérience, on sait que les participants commencent à se mettre sur les pelouses, à sortir une ou deux bouteilles qui sont pourtant interdites sur le campus…

Après le dîner, on lance un feu d’artifice juste avant la soirée qui a lieu pour la première fois cette année dans un bâtiment de l’école, alors qu’avant on faisait ça dans un chapiteau qu’on montait pour l’événement et qui nous coûtait cher. Ça nous a permis de débloquer du budget pour autre chose, et puis surtout, ça augmente le standing de cette soirée !

la soiree du toss

As-tu conscience d’avoir acquis des compétences en travaillant dans l’association ?

En tant que Président, je dois manager une équipe de 36 personnes. Au début, je ne savais pas trop comment réagir face aux gens, pour leur demander de faire des choses tout en restant amical parce qu’on est quand même dans une asso… ce n’est pas non plus une entreprise même si on commence à s’en rapprocher dans notre développement. En prenant du recul, je me rends compte qu’on a tous gagné en maturité cette année. Personnellement, j’ai dû me pencher sur pas mal de textes juridiques pour être au point sur les statuts et faire les assemblées générales, etc.

 

J’ai également grandement appris dans ma capacité à gérer l’humain. Notamment lorsqu’un membre de l’équipe nous a un peu quittés parce qu’il avait des problèmes au niveau scolaire, il n’avait plus trop la tête à faire de l’associatif. Mon rôle a été de lui parler pour comprendre pourquoi il ne nous aidait pas alors qu’initialement, c’était quelqu’un de très motivé.

Et puis cette année, les 36 membres du bureau sont issus de la fusion associative des équipes de Supélec et de Centrale. C’est le BDS de Supélec qui organisait le TOSS et qui a une plus grosse structure donc de manière naturelle c’est la structure de Supélec qui s’est imposée sur celle de Centrale. Ce n’était pas évident pour tout le monde que je sois le Président des deux équipes réunies. Derrière, il fallait apporter toute une fusion de cultures, d’habitudes…

 

Quelle a été ta stratégie pour gérer cette fusion délicate ?

J’ai remarqué que dans une fusion, en tout cas dans notre équipe, 70% de chaque côté acceptaient le changement et les compromis inhérents, dont la perte de certaines traditions qui en font apparaître d’autres en parallèle. Mais cela veut aussi dire que de chaque côté,  30% des gens sont très réticents et conservateurs des valeurs. Je devais donc les conseiller, les convaincre : penser au futur de l’asso, voir sur le long terme plutôt que de s’attarder sur cette année transitoire. Le but étant de permettre aux premières années d’arriver dans une structure qui ait du sens, qui ne se perde pas dans un fouillis de discussions et de conflits en interne, car ce n’est bénéfique pour personne.

J’ai pu constater que mon mode de management est un management à l’écoute et positif plutôt qu’un management autoritaire. Je considère que dans l’associatif, on est surtout là pour s’amuser et il ne faut pas qu’on soit forcé à faire les choses, de toute façon on ne le fait pas pour être rémunéré, donc l’objectif c’est de faire plaisir aux gens, d’avoir une action bénévole et positive sur ce qui nous entoure.

le toss necessite des sponsors

As-tu de bons/mauvais souvenirs à partager ?

On essaye de travailler la cohésion d’équipe pour développer une ambiance familiale parce que même si on est sur le même campus, on ne se voit pas forcément tout le temps. Là, on revient justement d’un week-end en Bourgogne tous ensemble et on rapporte avec nous pas mal de souvenirs sympas de ce côté-là ! Après, j’ai appris en rentrant que mes collègues avaient quand même un peu déconné même si sur le coup, c’était assez drôle. Ils ont ramené une charrette avec des roues de 3 mètres dans le gîte, sur le coup ça nous a fait rire, mais quand j’ai reçu un coup de fil du propriétaire qui m’a dit que des gens sont rentrés en effraction chez ses voisins, ça fait moins rire et à ce moment là, il faut payer les pots cassés. Mais bon, ça fait partie du jeu, on reste des étudiants, on est aussi là pour s’amuser et pas seulement pour travailler dans l’asso, il faut pouvoir s’octroyer des moments sympas entre nous.

 

Comment envisagez-vous de vous développer ?

En terme d’effectif, on est limité de manière assez logistique. On ne peut pas proposer l’hébergement à tous, on se limite à un peu moins de 2000-1800 personnes, ça représente déjà environ 800 tentes ! Au niveau des infrastructures sportives, on préfère centrer au maximum l’événement sur le campus pour faire un événement de proximité. Mais la fusion de Centrale Supélec permet d’apporter de nouvelles infrastructures et l’émergence de l’Université Paris Saclay, qui sort de terre sur le plateau avec de nouvelles écoles, va potentiellement permettre d’augmenter la dimension de l’événement tout en centralisant les tournois  sur le campus.

 

À travers le TOSS on travaille aussi autour de trois axes d’innovation :

  1. Chaque année, on invite une entreprise qui sponsorise une activité d’initiation au handisport, à travers un tournoi de basket en fauteuil roulant par exemple, pour sensibiliser les participants à cette pratique sportive.
  2. Nous avons aussi lancé un projet éco-responsable parce que le TOSS dégage beaucoup de déchets. Ce qui nous a poussé à imaginer ça, c’est l’édition d’il y a deux ans où, lorsque les participants sont partis, les organisateurs ont passé 3 jours à ramasser tout ce qui traînait sur le campus. Depuis l’année dernière, ils ont commencé à mettre en place des mesures et cette année, on a créé le pôle gestion de l’éco-responsabilité qui organise les systèmes de poubelles à double flux pour faire du recyclage, l’affichage pour inciter à recycler, et la brigade verte qui se balade tout au long du week-end pour inciter les participants à trier et ramasser leurs déchets.
  3. Enfin, on travaille beaucoup la parité homme-femme pour avoir un événement paritaire en terme d’effectif, parce que souvent, dans le sport, on a tendance à avoir plus de facilité à remplir les tournois masculins. On pense que ce n’est pas une raison de limiter les infrastructures féminines : on a 3 800 participants prévus cette année, on pourrait en avoir plus si on acceptait plus de garçons (500 personnes sont sur liste d’attente), mais on n’a pas envie de remplacer les tournois féminins par des garçons supplémentaires. Cette technique nous a permis d’augmenter la proportion filles-garçons sur l’événement à 40% contre 60%. Et puis, au-delà du sport, tout au long du week-end et pour la soirée, c’est plus sympa d’être mélangés ! Surtout qu’un bon nombre de participants viennent d’écoles d’ingénieurs où il n’y a que 10-20% de filles…  Cette année, on a aussi débloqué un budget pour ouvrir un tournoi féminin pour l’événement de football en février, ce qui nous a permis de rassembler 32 équipes masculines et 16 équipes féminines. Ça a plutôt bien marché pour la première année, on était contents et on espère que ça va continuer comme ça, d’autant que les filles nous disent souvent qu’il n’y a pas beaucoup de tournois qui leur sont proposés.

supporters au TOSS sur le cote d un terrain

Avez-vous des vêtements personnalisés ? Pourquoi ?

Oui on a pas mal de textiles personnalisés. Tous les nouveaux membres de l’asso reçoivent un polo à leur arrivée avec leurs noms dessus, on le met dans les moments de cohésion, et ça nous permet d’avoir une entité visuelle. Ensuite, on se fait toujours une veste au cours de l’année avec les lettres BDS écrites à l’arrière. On a aussi des petit goodies, une casquette et un k-way.

Pour les 200 bénévoles de la team TOSS, on commande des polos avec écrit TOSS, leur surnom et leur pôle de logistique, pour toujours garder cette identité durant le weekend et aider les participants à savoir à qui s’adresser.

Pour les participants du TOSS, on prépare aussi des tee-shirts, ça en fait quand même 4 000 ! Et puis au tout début d’année, on fait aussi un tee-shirt et un short au nom de l’école et de l’association sportive pour tous les cotisants du bureau des sports.

Quelles sont tes ambitions professionnelles après cette expérience au sein de l’asso ?

J’ai toujours su que j’aimais bien gérer des équipes et être à la tête d’un projet donc ça m’a confirmé dans cette idée. Dans ma vie, j’aimerais pouvoir mener des projets  passionnants et pour lesquels j’ai envie de me lever le matin. Lorsque je me couche tard pour réviser, ça m’emmerde bien, alors que pour une réunion d’asso, ça me fait plaisir. Je pense que c’est vraiment important dans la vie d’avoir des projets qui nous tiennent à cœur, sinon c’est compliqué de se lever le matin et ce n’est pas intéressant professionnellement.

 

Des conseils pour organiser un tournoi sportif ou créer une association sportive ?

Déjà, il faut commencer par cibler les besoins des gens et je pense qu’il y a vraiment une émulation autour du sport en ce moment, tout le monde sait les bienfaits du sport et le plaisir que c’est d’en faire et d’en organiser. Donc il faut se lancer, surtout si on a de la motivation, ne pas hésiter à y aller. Le TOSS fête cette année sa 30e édition, mais il n’y avait que 400 personnes la première fois, donc à force d’efforts et d’améliorations, on peut arriver à multiplier l’effectif par 10, et à avoir quelque chose qui est vraiment sympa, beau à organiser et qui rend toujours les participants contents !

 

 

 

Pour en savoir + : https://bds-supelec.fr/toss/

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